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Santé
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Viread en Afrique

Les labos américains sacrifieraient des prostituées africaines pour un vaccin contre le Sida ! Crime contre l'humanité ou avancée médicale majeure ?

Du vrai / du faux Du vrai / du faux
01/01/2005 Par hoaxbuster
Pertinence
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Ce message a été repris sur de nombreux forums et sites internet. Et comme à l'accoutumée, le saut de BAL en BAL connaît un franc succès.

Même si un reportage de France Télévisions (France 2) a bien été diffusé sur le sujet en janvier 2005, bon nombre d'affirmations contenues dans ce message sont erronées ou mensongères et relèvent de la pure spéculation.

 

Certaines fondations ou O.N.G. telles que F.H.I. (financée par Bill Gates) mettent effectivement au point des essais thérapeutiques sur l'utilisation préventive d'anti-rétroviraux.

 

La première question qu'il est légitime de se poser est : pourquoi sur des prostituées ?

Tout simplement parce que c'est une population à risque. Quelle légitimité accorderions-nous à un essai thérapeutique s'il était pratiqué dans une maison de retraite du Vatican ?

Ce genre d'études - hautement sensible - est qualifié de cynique par certains, d'hypocrite par d'autres qui considèrent qu'il est inadmissible de prendre des gens condamnés et de leur faire miroiter un tel miracle. Il est indéniable que ces essais emploient une population pas toujours à même de comprendre qu'une fois l'étude terminée, bon nombre de ses acteurs seront morts ou voués à une mort certaine.

 

Les tests cliniques sur le Viread (du laboratoire Gilead, sponsorisé par Bill Gates) concernent 960 prostituées au Cambodge et 800 au Cameroun. La moitié d'entre elles reçoit le médicament et l'autre moitié, un placébo (produit neutre présenté comme le médicament). Le Viread est aujourd'hui connu et utilisé pour stopper l'infection des malades séropositifs, l'étude porte maintenant sur la protection des séronégatifs.

 

Contrairement à ce qui est écrit dans le message, il ne s'agit pas d'envoyer ces femmes à la mort, mais de voir si l'on peut diminuer la contamination des populations très exposées.

150 000 préservatifs ont d'ores et déjà été donnés à ces femmes, le programme prévoyant d'en distribuer 900 000. Les "avantages" dont bénéficient les prostituées sont un suivi médical (coûteux) et un peu d'espérance de vie en plus. Les pays concernés par cette recherche y trouvent également leur intérêt puisque le Viread leur sera facturé à prix coûtant.

 

Inutile de préciser que les fondations ou les O.N.G. tentent bien évidemment de faire régresser l'épidémie et pas le contraire (le message initial étant volontairement mensonger). Les laboratoires pharmaceutiques, quant à eux, tentent d'accroître la "surface de prescription" de leurs médicaments.

 

Précisons que d'un point de vue légal :

  • les essais thérapeutiques sont obligatoires et doivent être représentatifs.
  • Ils doivent être réalisés sur des sujets présentant un risque vis-à-vis de la maladie.
  •  Lorsqu'il existe déjà un médicament efficace, on compare les résultats des tests entre le nouveau et l'ancien.

 

Mais, et tout le dilemme est là, lorsque l'on teste le tout premier médicament, alors l'essai est effectué en comparant les résultats avec un placébo. Et, donner du lactose à des prostituées puis les regarder mourir du Sida est, tout simplement, difficilement défendable.

 

On peut également reprocher l'ambiguïté malsaine qui règne lors d'un tel essai thérapeutique :
En effet, F.H.I. assure solliciter le port du préservatif auprès des prostituées, mais le laboratoire sait pertinemment que l'étude n'a de sens que si elles ne se protègent pas (ou tout du moins qu'elles ne changent pas leurs habitudes quotidiennes).

 

De plus, les tests ne semblent pas être réalisés en toute transparence, ni supervisés par un arbitre impartial. En effet, on ne peut qu'être déçu du manque d'implication des gouverments de l' OMS et de l'ONU sur le sujet.

 

Malheureusement, ce type de sujet connaît une récupération politique basée sur un anti-américanisme primaire. C'est alors la porte ouverte aux théories "re-colonialistes", à l'obscurantisme et au complot mondial que l'on trouve sur certains forums.

Tout aussi révoltante, l'attitude de certaines organisations anti-Sida de pays riches, bénéficiant de traitements à 1000 $ par mois, et qui s'offusquent que l'on fasse des tests en Afrique, sur des médicaments coutant 8 $ par mois.

 

En conclusion, l'étude Viread est réelle et porte essentiellement sur une population à haut risque constituée de prostituées africaines et cambodgiennes. En revanche, le message en circulation contient de nombreuses approximations et mensonges venant très largement altérer le jugement objectif que chaque individu peut porter sur la nécessité d'une telle étude, jusqu'à le rendre complètement subjectif et faussé.

 

Encore une fois, désinformer n'est sans doute pas la meilleure arme quand on prétend vouloir "informer un grand nombre de personnes"...

 

Nous vous recommandons fortement de lire la réponse de F.H.I. suite à nos interrogations sur les essais du ténofovir au Cameroun (pays ayant suspendu les essais le 07 février sur décision du ministère de la santé). Par ailleurs, voici la réaction d'Act-Up Paris suite à notre article.

 

A lire aussi :
- IRIN Cameroun
- Conférence sur le Sida au Cambodge

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hoaxbuster
Rédacteur Hoax
mots-clés : Santé - Information
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